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Tourisme & métropole : une autre image de la destination Paris


  • Eté du canal 2015 Bellastock Bobigny 6
  • Air France CDG
  • Cité du cinéma
  • Greeters Bassin de la Villette
  • La Courneuve
  • La Philharmonie de Paris
  • La Philharmonie de Paris
  • Le cyklop
  • PSA Usine de Saint-Ouen
  • Vue aérienne du Stade de France

Paris est en matière touristique, la 1ère destination mondiale. Une destination d'un rayonnement tel que son influence dépasse largement ses frontières administratives et varie suivant la provenance des touristes. De l'étranger, Paris se lit bien souvent à une échelle métropolitaine intégrant ses deux aéroports dans la capitale. Cette influence peut parfois aller bien au-delà, un chinois peut lors de son séjour à Paris, visiter les châteaux de la Loire où le Mont Saint-Michel et avoir le sentiment «d'être» à Paris. Les échelles varient au regard de sa culture ou de sa provenance.

C'est aujourd'hui à l'échelle d'un Paris élargi, d'un Paris englobant au minimum les trois départements de petite couronne que se pense la nouvelle métropole. Si cet élargissement est légitime au regard des échelles touristiques et déjà largement à l'½uvre dans le secteur hôtelier, elle ne le sera complètement que si la gouvernance touristique intègre les stratégies déjà mises en place et favorise l'émergence d'offres en construction, prenant en compte les spécificités propres des territoires.

Nord-Est parisien, un tourisme hors des sentiers battus

Depuis les années 2000, la Seine-Saint-Denis a choisi de sortir de ses frontières pour travailler à une échelle plus large correspondant à des identités territoriales et répondant à des logiques touristiques. C’est par un dialogue avec les structures touristiques phares intégrant des problématiques proches – Cité des sciences et de l’Industrie, Parc de la Villette, Cité de la musique appelée aujourd'hui Philharmonie 2 - c’est à dire en dehors de l’hypercentre touristique, qu’une collaboration s’appuyant sur des actions de promotion communes s’est mise en place. Mais au-delà de se retrouver sur l’idée d’être à la « marge », d’être dans des territoires emprunts d’une moins-value touristique, il semblait évident à ces acteurs du tourisme et de la culture que se jouait ici une autre partition ; que pouvait s'écrire une nouvelle page de l'histoire touristique. Ce territoire si souvent stigmatisé, pourrait sortir Paris de sa muséification, extirper la capitale de cette image d'un « Paris vieillot » comme se plaît à le qualifier le rédacteur en chef du GQ* russe, extraire la Ville Lumière d'un immobilisme passéiste ne rendant la destination attractive qu'à travers une image glorieuse et poussiéreuse, signe d'un certain déclin.

Tourisme participatif, un autre tourisme

Au-delà de certains sites remarquables comme les puces de Saint-Ouen, la Basilique de Saint-Denis, le Stade de France ou le Musée de l’Air et de l’Espace (qui pourtant au regard de leur importance patrimoniale et malgré des chiffres correctes sont en deçà de ce à quoi ils pourraient espérer), il existait en pointillé un potentiel pour un autre tourisme, un tourisme qui devait asseoir ses spécificités sur l’identité de ces territoires. Petit à petit s'est mis en place avec les forces en présence, un tourisme d’un nouveau genre, un tourisme participatif, un tourisme basé sur la rencontre et l’échange, concrétisé par un programme de balades urbaines et de visites d'entreprises parisiennes souvent cités en exemple.

La balade urbaine développée par des associations et mis en communication par le Comité départemental du tourisme de la Seine-Saint-Denis (CDT93) "est une invitation à aller à la rencontre des gens qui vivent et travaillent en Seine-Saint-Denis."** Ce programme répond à trois objectifs principaux : construire de réels produits touristiques fondés sur le patrimoine architectural, industriel et "humain" du département ; valoriser aux yeux des visiteurs extérieurs, ce territoire insolite et contrasté, et enfin revaloriser, à travers le regard touristique, l’image que les habitants ont de leur propre environnement.

L'aspect des visites d'entreprise, quant à lui, met en avant son "patrimoine industriel et les savoir-faire de ses entreprises. La visite d’entreprise est apparue comme un outil efficace de valorisation du territoire en même temps qu’un vecteur de développement de la culture scientifique, technique et industrielle."***

Visite autour des savoir-faire français

Si ces programmes ont su donner une visibilité à ce territoire par un nouveau genre de tourisme, les institutions ne sont heureusement pas les seules à ½uvrer pour ces approches plus humaines et moins standardisées du tourisme.  Des initiatives issues du mouvement associatif, telle que Accueil Banlieue proposent d' "approcher la réalité d’activités au long cours, de découvrir des sites historiques reconnus et d'autres plus contemporains" en logeant les touristes pour seulement 15 ¤ à proximité de Paris ou dans Paris mais en incluant une visite "obligatoire" du territoire dans lequel ils résident. Cette balade se transformant toujours en un moment d'échange et de plaisir.

Le programme des Greeters, présents à Paris et en banlieue partout où le métro est implanté, propose de son côté une balade entre un habitant et un touriste pour le plaisir de la rencontre et de la découverte du mode de vie des autochtones.

Street art, une nouvelle offre touristique

Ce n’est donc pas un hasard si un territoire où les conditions de vie parfois difficiles entraînant des élans de solidarité importants, a su capitaliser sur ces énergies humaines pour dévoiler la vision d’un tourisme plus solidaire. Cette énergie, ce besoin d’expression, cette nécessité de revendication à fait de la Seine-Saint-Denis le territoire de naissance des cultures urbaines. C’est sur ces terres que sont apparus ou que se sont popularisées des expressions artistiques telles que le rap, le slam, le graffiti appelé aussi dans sa pratique plus « artistique » le street art.

Cette expression populaire devient dans un grand nombre de capitales européennes un véritable enjeu touristique. Les réseaux sociaux à travers le monde abondent de témoignages et d’images de « pièces » prises sur les murs et le mobilier urbain des villes, créant des communautés sans cesse élargies de touristes. Livres, expositions, magazines, ventes aux enchères, le street art est à l'heure actuelle au centre d'un engouement à peu près équivalent au rejet dont il était l'objet il y a encore quelques années.

La convergence de l’histoire du street art en France et de son intérêt touristique nécessite de créer les conditions nécessaires à sa "mise en tourisme". Comme Seine-Saint-Denis Tourisme l’a fait précédemment avec ces visites d’entreprise et ses balades, il appartient à cet organisme de sensibiliser les acteurs de son territoire à la constitution d’une offre légitime et à fort potentiel. Plusieurs expériences ont ainsi été menées à différentes échelles pour évaluer l’impact que pourrait avoir ce type d’offre. L’événement d’été sur le canal de l'Ourcq « L’été du Canal » a été le premier terrain d’expression. Un collectif de street artistes graffait tous les week-ends de la manifestation sur des palissades. Le succès de ces démonstrations a conduit à développer le dispositif à l’échelle d’un bâtiment emblématique du canal de l’Ourcq, le « bâtiment des douanes » - où s'implantera en 2016 la célèbre agence de publicité BETC. Le retentissement médiatique de l’opération, le buzz du milieu du street art ont conforté le sentiment que ces pratiques suscitaient l’adhésion d’un large public. L’année 2013 mis le concept d’un artiste mondialement reconnu JR et de son programme « Inside out » à l’honneur. Le principe consista à photographier 300 salariés d’entreprises proches du canal et à afficher leurs portraits le long des berges de Pantin à Paris. Là encore le succès fut au rendez-vous. La presse s’empara de l’installation pour parler positivement du territoire. L'année 2014 ancra réellement ces pratiques artistiques de façon plus pérenne en "redécorant" une cheminée industriel et des pignons d'immeubles par des artistes pour certains internationalement reconnus.

Le développement du street art en tant facteur du développement du touristique n’est pas l’apanage de la Seine-Saint-Denis, Vitry-sur-Seine dans le Val de Marne propose une offre conséquente tout comme le 20° ou le 13° arrondissements de Paris qui ont bien compris le potentiel de ces formes artistiques.

Toutefois les conditions ne sont pas encore toutes réunies pour faire de la Seine-Saint-Denis « la » destination du street art. Afin de pouvoir créer des parcours virtuels, accompagnés des ateliers participatifs, les artistes doivent pouvoir s’exprimer sur des surfaces pérennes au moins à moyen terme. De tels endroits existent déjà mais sont trop disséminés pour créer une véritable offre touristique à part entière, hormis peut-être sur la commune de Bagnolet riche en fresques. Il est certainement nécessaire de sensibiliser les municipalités à l’intérêt d’un tel développement pour que des villes sans infrastructure touristique structurante puissent tirer parties de cet engouement.

De nouveaux pôles touristiques

Mais fort heureusement le tourisme dans le Nord-Est Parisien ne se limite pas au tourisme participatif et au street art. L’arrivée d’équipements de très grandes envergures redessinent les pôles d’attractions de la capitale.

La Cité du Cinéma à Saint-Denis, ville déjà riche de sa Basilique et de son Stade, accueille dans un bâtiment industriel monumental du début du 20° siècle,  des studios de tournages rivalisant avec les plus grands équipements dans le monde. Son ouverture progressive à d'autres publics que les professionnels de l'image offre de belles perspectives pour l'industrie touristique. L'accueil d’événements d'entreprise dans un positionnement haut de gamme au même titre que le Grand Palais élargie l'offre pour le tourisme d'affaires. Pour le grand public, l'ouverture de ses portes par le Comité départemental du tourisme a démontré le potentiel touristique de ce lieu qui doit maintenant prendre une place stratégique dans son développement. Les chiffres très impressionnants de l'exposition Star Wars Identities en 2014 hébergée à la Cité, (autour de 400 000 visiteurs) et Harry Potter (autour des 450 000 visiteurs) démontrent une fois encore qu'un contenu attractif fait déplacer les foules même dans des lieux encore peu identifiés par le grand public.

Autre pôle déjà très fréquenté par les touristes : La Villette. Reconnue comme fer de lance dans la culture scientifique avec La Cité des Sciences, dans les arts vivants avec le Parc de La Villette et la vitalité de multiples structures culturelles, va encore renforcer considérablement son attractivité avec l'arrivée de la Philharmonie de Paris décuplant ainsi l'offre de la Cité de la Musique et donnant, en plus d'un emblème architectural conçu par Jean Nouvel, une position quasi hégémonique de l'est dans le secteur de la musique classique avec notamment une salle de concert de 2 400 places.

Pourtant, le Parc de La Villette, plus grand parc urbain de Paris, pourrait perdre ce titre avec l'avènement du Grand Paris au profit du Parc Georges Valbon, plus connu sous le nom de Parc de La Courneuve. Cet espace pourrait bénéficier du plus grand projet d'aménagement urbain d'Europe. Le projet s'étalant sur 1,7 million de mètres carrés, prévoit 2 000 immeubles, soit 24 000 logements devenant ainsi le c½ur « naturel » du grand Paris, son Central Park comme les journalistes aiment à le qualifier, et permettra peut-être à Paris de perdre ce triste record de capitale d'Europe la plus pauvre en espace vert par habitant.

S'il est un pôle touristique emblématique de ce Grand Paris en développement, c'est bien le canal de l'Ourcq. Ce canal construit durant le premier quart du 19ème siècle permet à la fois l’alimentation de Paris en eau potable et l’établissement d’une nouvelle voie de transport de marchandises vers la capitale. Cette voie commerciale tombe en désuétude à la fin du 20ème siècle. En 2009, un événement initié par le Comité départemental du tourisme de la Seine-Saint-Denis et des communes bordant le canal « L'été du canal » redonne des couleurs à cette voie d'eau. Des navettes fluviales, plages, bals, concerts, animations street art, péniches culturelles créent un lien entre Paris Plage installé sur le bassin de la Villette (commencement du canal de l'Ourcq), le parc de La Villette et Pantin, Bobigny, Noisy-le-Sec, Bondy et Aulnay-sous-Bois. Depuis la revitalisation de cette zone,  notamment par l'Eté du canal, l'offre touristique ne cesse de se développer sur l'eau : des bateaux électriques sans pilote sont proposés à la location, des croisières touristiques hippomobiles s'organisent tous les étés et un port de plaisance avec une base de ski nautique va s'ouvrir dans les années à venir... Les berges aussi s'aménagent avec l'apparition de cafés et restaurants. Le canal invente donc une nouvelle offre touristique entre Paris et sa banlieue, destination hautement symbolique puisque le passage du périphérique, frontière d'habitude si prégnante entre Paris et sa périphérie, est totalement gommé sur les eaux de l'Ourcq : son passage s'apparentant à franchir un pont comme les autres. Le canal de l'Ourcq offre une vision à fleur de ville unique à Paris et un cadre de villégiature déjà largement utilisé par les franciliens et une part croissante de touristes étrangers. 

Le tourisme d'affaires, parent riche du tourisme dans l'Est Parisien

Il n'est jamais totalement inutile de rappeler le poids du tourisme d'affaires dans l'économie francilienne. Avec près de 45% des nuitées hôtelières en Ile-de-France, et une dépense moyenne deux fois et demi plus élevée que le touriste d'agrément, le touriste d'affaires est une cible majeure de cette industrie.

Si dans ce domaine la Seine-Saint-Denis et le Nord-Est parisien sont richement dotés, cette place ne cesse de se conforter avec les projets en cours. Si la Cité du cinéma et la Philharmonie prennent, ou vont prendre, une place conséquente sur ce marché, l'arrivée du Paris Event Center – 15 000m² d'exposition à la Porte de La Villette renforce l'attractivité de Paris pour l'accueil de salons et d’événements d'entreprises. L'offre devrait encore s'enrichir avec Le Parc des expositions de Villepinte, plus grand parc d'exposition en France, qui devrait à terme s'étendre sur 350 000 m² et l'implantation de l'International Trade Center (ITC) à Roissy-en-France avec la construction de 7 hôtels soit 1 142 chambres, de 44 000 m² de surface d'exposition et d'un centre de conférence de 35 000 m² agrémenté de 100 salles de réunion.

En marge de ce tourisme, la création du campus Condorcet à la Porte d'Aubervilliers rassemblera à terme plus de 17 000 étudiants, chercheurs et personnel administratif. Des écoles qui attireront des scientifiques du monde entier comme le CNRS, l'EHESS ou l'EPHE prendront place sur le campus, renforçant encore l'attractivité et la qualification de ce territoire.

Les grands événements au c½ur de la métropole

C'est aussi là que se joue la majeure partie des événements internationaux qui contribuent à l'aura de Paris. Quand le président de la République lors de son allocution télévisée du 6 novembre 2014, parle des grands événements à venir dans un avenir certain, il en cite deux : la Cop 21 (Conférence climat) qui s'est déroulée au Bourget fin 2015 et l'Euro de football 2016 dont le match d'ouverture et la finale, ainsi que 5 autres matchs se sont joués à Saint-Denis au Stade de France, preuve s'il en est encore besoin que les « marges » d'hier sont les centres d'aujourd'hui et de demain.

Et demain, quel tourisme pour la métropole ?

La Seine-Saint-Denis et le Nord-Est Parisien sont appelés à intégrer la métropole du Grand Paris. Mais au-delà des appellations administratives ou communicationnelles, c'est l'identité et les valeurs que portent ce territoire qui laisseront une empreinte de modernité à ce Paris métropolitain. La Seine-Saint-Denis offre aux touristes un autre visage, une autre dimension de la destination. Un Paris alternatif, créatif et participatif tourné vers le futur, une destination plus « soutenable » au sens écologique du terme, avec la multiplication d'écoquartier. Un Paris qui intègre sa banlieue proche pour renouveler et dynamiser son image.

Mais la future gouvernance de ce Grand Paris sera-t-elle entendre ces enjeux ? Comme bien souvent, il faudra reparler de l'impact économique majeur de ce secteur d'activité, soit plus de 50 000 emplois salariés dans les activités liées au tourisme en Ile-de-France, les enjeux d'images et de fierté des populations bien que moteur de la pensée touristique sont régulièrement relégués au second plan. Une fois encore, ce développement que nous attendons et que nous espérons devra être accompagné de mesures rendant ce tourisme supportable pour les habitants et « durable » pour l'environnement. Une gouvernance qui n'inclurait pas très en amont ces composantes passerait à côté d'un sujet clé trop régulièrement sous-estimé. L'industrie touristique étant souvent peu considérée dans un pays qui pourtant tire de ce secteur des revenus substantiels et des emplois non délocalisables. Il faut maintenant convaincre les futurs élus de la métropole de la pertinence et de l’intérêt du développement touristique des départements de petite couronne dans le cadre d'un Grand Paris soucieux de ses habitants et de son image à l'international.

* GQ est un magazine masculin consacré à la mode au style et à la culture. Il est édité dans une vingtaine de pays.
** Hélène Sallet-Lavorel -Revue Espace
*** Luc Fauchois – Revue Espace

Voir aussi l'article paru dans Le Monde : "Fini le tourisme plan-plan, direction le 93 "

Vendredi 28 Août 2015 - 10:17

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